samedi 15 mai 2010

Mise ces terres rieuses

Qu'est ce que l'amour sinon une grande illusion, peut-être la plus grande irraison de l'humanité ? On nous envoie à grand coups de poings des images et des musiques qui nous bercent et nous versent dans des fleuves où l'on se noit, dans des fleuves où l'on sort pour s'y replonger à nouveau, comme une soif à combler immédiatement. Rien ne peut nous en séparer, rien ne peut nous dissuader d'y boire. Plus les heures passent, plus cette soif nous envahit, jusqu'à en mourir. Mourir de soif. Mourir d'amour.
Comment un coeur peut-il être si influençable ? En quoi l'amour est une force formidable, peut-être plus que n'importe quelle autre force ?
Voyez la vie d'un homme. Voyez sa frustration face aux murs qui délimitent sa vie. Face à ce qu'il sait ne pas savoir. Face au temps qui le sculpte. Face au vide. L'Homme porte cette douleur au ventre, cette nausée qui reste telle une pierre posée au fond de lui. Qui suis-je ? Pourquoi suis-je ici ? Et quel est cet ici ? D'où vient-il ? Où nous amène-t-il ? Tant de questions qui arrachent des hurlement à la conscience, de savoir qu'on ne saura jamais, que nous ne sommes finalement que des êtres limités, au contours flous qu'on ne sait pas dessiner. Ne nous attardons pas sur ce sujet, sur ces questions inutiles qui, en cherchant à y répondre, nous troubleraient finalement.
Ces questions, ces frustrations face à ces limites évoquées créent une douleur en nous qui s'apparente au vide. Finalement vide de toute réponse, de tout but absolument concret, définitif, l'Homme cherche un sentiment aussi fort que la douleur de l'ignorance est terrible.
Les contradictions sont légitimes puisqu'elles s'équilibrent et amènent à un semblant de vie moins pesante que sans elles. Or seule une passion peut masquer une extrême douleur. Qu'elle soit vécue ou platonique, elle masque une douleur plus profonde encore, et peut même devenir illusoirement plus extrême. La passion est un rêve. La passion est une illusion qui naît du désir. Le désir est réel. Trop réel. Trop triste. Quelle tristesse pour l'Homme de s'apparenter à un simple animal qui doit satisfaire ses désirs ! Non, l'Homme se croit bien plus grand puisque qu'il a la faculté de croire. N'est ce pas plus agréable d'imaginer possible une passion éternelle ? Une force parfaitement humaine, si pure et si perçante qu'elle pourrait transgresser la mort et perdurer dans une métaphysique qui nous montre finalement une face attirante, une face qu'on pense contrôler.
Mais de cette illusion résulte un coup plus fort encore que ceux que l'ignorance nous porte.
Pour la première fois, on s'imagine être plus grand que la vie, on s'imagine toucher du bout de l'index une force invisible, mystérieuse et palpitante et s'approprier ses pouvoirs.
Le rêve se construit, on vit en lui, on est bercé par un espoir ridicule qui nous ouvre le corps entier, nous dissèque sans nous refermer et nous laisse ainsi aux yeux de tous, honteux et ridicule de s'être laissé mangé par ses pensées, finalement par soi-même, par son propre espoir, sa propre imagination.
Puis on replonge dans le fleuve. Quitte à nous bouffer, c'est le seul qui soit capable de nous éloigner de la réalité pourtant si mystérieuse. Laissons-nous bercer. Laissons-nous couler. Puisqu'on finit tous par se noyer, d'une façon ou d'une autre.

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